Comment les normes NFT définissent la fonctionnalité des actifs numériques

Comment les normes NFT définissent la fonctionnalité des actifs numériques

Quand vous achetez un NFT, vous pensez peut-être à une image, un son ou un tweet. Mais ce qui rend cet objet numérique réellement unique, ce n’est pas l’image elle-même - c’est la norme technique qui le porte. Sans normes comme ERC-721 ou ERC-1155, un NFT serait juste un fichier stocké sur un serveur, sans preuve d’ownership, sans transfert sécurisé, sans compatibilité entre les plateformes. Les normes NFT sont les règles du jeu. Elles dictent comment un actif est créé, comment il change de main, et surtout, comment il est reconnu par n’importe quel portefeuille ou marché du monde entier.

ERC-721 : le pionnier qui a tout changé

Avant 2017, il n’existait pas de standard pour les jetons non fongibles. Les blockchains géraient des crypto-monnaies comme l’ETH, identiques et interchangeables. Puis CryptoKitties est arrivé. Ce jeu simple, où vous pouviez acheter, élever et vendre des chats numériques uniques, a explosé. Et avec lui, le besoin d’un standard. C’est là qu’est né ERC-721, proposé en janvier 2018 comme EIP-721 sur Ethereum. Il a défini trois fonctions essentielles : transferFrom, approve, et ownerOf. Chaque NFT doit avoir un ID unique, un propriétaire clairement identifié, et un mécanisme pour transférer ce propriétaire à quelqu’un d’autre.

La force d’ERC-721, c’est sa simplicité. Elle garantit que n’importe quel portefeuille - Metamask, Trust Wallet, Phantom - peut lire et afficher un NFT ERC-721. C’est pourquoi OpenSea, SuperRare et Foundation ont tous commencé avec ce standard. Mais sa simplicité a un prix. Pour transférer 10 NFTs, vous devez effectuer 10 transactions séparées. Chaque transaction coûte entre 45 000 et 60 000 unités de gaz. À un prix moyen de 55 gwei et 1 950 $ l’ETH, chaque transfert coûte environ 1,85 $. Pour 10 NFTs ? 18,50 $. Pour 100 ? 185 $. Et ce n’est que le coût du transfert - pas celui de la création.

Un autre problème majeur : la validation des récepteurs. Si vous envoyez un NFT ERC-721 à un contrat intelligent qui ne sait pas le traiter, le jeton est perdu pour toujours. Les développeurs ont perdu des milliers de dollars en testant des transferts vers des adresses non préparées. Le standard exige que le récepteur implémente une interface spécifique, mais beaucoup ne le font pas - et les portefeuilles ne le vérifient pas toujours. Résultat ? Des NFTs disparus dans l’éther.

ERC-1155 : la révolution du multi-jetons

En 2018, Enjin a sorti ERC-1155. Pas pour remplacer ERC-721, mais pour le dépasser dans les cas d’usage où la quantité compte. ERC-1155 est un standard multi-jetons. Un seul contrat peut gérer des jetons fongibles (comme des pièces de monnaie dans un jeu), des jetons non fongibles (comme une épée unique), et même des versions partielles (comme 5 épées identiques). Tout ça, en une seule transaction.

Imaginez un jeu comme Axie Infinity. Un joueur veut vendre 3 Axies (NFTs uniques) et 100 SLP (jetons fongibles utilisés pour nourrir ses créatures). Avec ERC-721, il faudrait 103 transactions. Avec ERC-1155 ? Une seule. Le gain en gaz est énorme : jusqu’à 90 % de réduction. Des benchmarks d’Enjin montrent qu’ajouter un NFT supplémentaire à une transaction ERC-1155 coûte seulement 17 000 à 20 000 unités de gaz - contre 45 000 à 60 000 pour ERC-721. Pour un développeur qui crée 5 000 NFTs, la différence de coût peut aller de 1 842 $ à 184 $. C’est la raison pour laquelle 82 % des développeurs de jeux choisissent ERC-1155 pour leurs nouveaux projets.

Et pourtant, ce n’est pas parfait. Les développeurs rapportent des difficultés avec la comptabilité mixte : comment suivre combien de jetons fongibles ou non fongibles un utilisateur possède dans un seul contrat ? Les erreurs de logique peuvent mener à des pertes ou à des vulnérabilités. Mais malgré ces défis, ERC-1155 est devenu le standard de facto pour les jeux, les métavers et les applications nécessitant des économies d’échelle.

ERC-721A : l’amélioration intelligente

ERC-721A n’est pas un nouveau standard. C’est une optimisation de ERC-721. Créé en 2022 par le développeur Azuki, il permet le batch minting - la création de plusieurs NFTs en une seule transaction. Cela résout le plus gros problème d’ERC-721 : le coût de la minting.

Avant ERC-721A, créer 100 NFTs signifiait 100 transactions séparées. Avec ERC-721A, vous pouvez en créer 100 en une seule. Les frais de gaz tombent de 185 $ à environ 35 $. C’est pourquoi des projets comme Bored Ape Yacht Club et Pudgy Penguins ont adopté cette version améliorée. DappRadar montre que sa part de marché a augmenté de 320 % entre le premier et le troisième trimestre 2023. Il est maintenant utilisé dans 23 % des nouveaux projets NFT.

La clé ? Il reste compatible avec ERC-721. Les marchés comme OpenSea le reconnaissent sans modification. Les portefeuilles le lisent comme un NFT normal. C’est une évolution intelligente : pas de rupture, juste une optimisation. Mais attention : il ne résout pas le problème des transferts multiples. Pour ça, il faut toujours ERC-1155.

Minting simultané de 100 NFTs avec ERC-721A, coût réduit en flèches visuelles.

Les autres standards : Sui, Tezos, Stacks

Ethereum domine encore avec 78,3 % du marché, mais d’autres blockchains apportent des approches différentes. Sur Tezos, le standard FA2 permet la création de NFTs avec des règles personnalisées, comme des royalties automatiques intégrées. C’est pourquoi les artistes sur Objkt.com préfèrent Tezos : les ventes secondaires génèrent des paiements directs aux créateurs.

Sur Stacks, les NFTs sont sécurisés par Bitcoin. Le standard SIP-009 permet de créer des jetons non fongibles dont la propriété est enregistrée sur la blockchain Bitcoin - la plus sécurisée du monde. Cela attire les utilisateurs qui ne font pas confiance à Ethereum, mais veulent quand même des NFTs.

Et puis il y a Sui. Son standard d’affichage (Object Display) exige que chaque NFT contienne un nom, une description, un lien, une URL de projet et une URL d’image. Mais la vraie innovation ? Il permet de stocker les images hors chaîne (sur IPFS ou un CDN) tout en gardant la preuve d’authenticité sur la blockchain. Sui réduit le temps de transfert d’un NFT de 15 secondes à moins de 500 millisecondes. Pour les applications en temps réel, c’est un avantage décisif.

Choisir le bon standard : ce qui compte vraiment

Il n’y a pas de « meilleur » standard. Il y a le bon standard pour le bon usage.

  • Vous êtes un artiste qui crée 10 œuvres uniques ? ERC-721 ou ERC-721A. Votre public connaît ces standards. Les marchés les prennent en charge. Votre NFT aura de la valeur parce qu’il est reconnu comme authentique.
  • Vous développez un jeu avec des objets, des pièces et des personnages ? ERC-1155. Vous économisez des milliers de dollars en frais de gaz. Vos joueurs n’ont pas à attendre 30 secondes pour acheter une épée.
  • Vous voulez que vos royalties soient garanties pour toujours ? FA2 sur Tezos. Les contrats intelligents sont immuables et les paiements automatiques.
  • Vous ciblez les utilisateurs qui croient en Bitcoin ? SIP-009 sur Stacks. Vous liez votre NFT à la blockchain la plus décentralisée.

Les entreprises adoptent aussi. 42 % des 67 entreprises du Fortune 500 qui ont lancé des NFTs en 2023 utilisent ERC-1155 pour gérer des actifs mixtes : billets d’événement, badges de fidélité, coupons numériques. Elles ne veulent pas payer 200 $ pour émettre 1 000 badges.

Écosystème NFT multi-standard avec Ethereum, Tezos et Stacks connectés.

Les risques et les pièges à éviter

Les normes ne sont pas des garanties. Elles sont des outils. Et comme tout outil, mal utilisé, elles peuvent causer des dommages.

Le plus gros risque ? La fragmentation. Si un NFT est sur ERC-721, il ne peut pas être échangé sur une plateforme qui ne le supporte pas. Des analyses de Chainalysis montrent que 28 % des transferts NFT échouent parce que les deux parties utilisent des standards incompatibles. Un NFT acheté sur OpenSea peut devenir inutilisable sur une marketplace de Solana.

Un autre piège : la métadonnée. 85 % des NFTs stockent leurs images sur IPFS. Mais si le serveur IPFS tombe, ou si le lien expiré, l’image disparaît. Le NFT reste - mais il ne vaut plus rien. La solution ? Utiliser des protocoles comme Arweave, qui garantissent le stockage permanent.

Et puis il y a la sécurité. Le système d’approbation d’ERC-721 a été exploité trois fois entre 2020 et 2022, pour un total de 2,7 millions de dollars volés. Les utilisateurs ont approuvé des contrats malveillants en pensant qu’ils transféraient juste un NFT. Le standard ne vérifie pas la confiance - il vérifie la syntaxe.

Le futur : vers une convergence des normes

Le futur des NFTs n’est pas un seul standard. C’est la capacité à les utiliser ensemble. Gartner prédit qu’en 2026, 70 % des plateformes majeures prendront en charge au moins trois standards. Ethereum travaille déjà sur EIP-6454, qui permettrait de déléguer temporairement la propriété d’un NFT - une fonctionnalité essentielle pour les locations ou les prêts.

Les nouveaux standards comme BRC-69 sur Bitcoin pourraient changer la donne. Si Bitcoin devient une plateforme viable pour les NFTs, cela redéfinira tout le paysage. Mais pour l’instant, Ethereum et ses dérivés (ERC-721, ERC-1155, ERC-721A) restent les piliers.

La leçon ? Ne choisissez pas un standard parce qu’il est tendance. Choisissez-le parce qu’il correspond à votre besoin. Un artiste ne doit pas utiliser ERC-1155 pour une œuvre unique. Un développeur de jeu ne doit pas utiliser ERC-721 pour 10 000 objets. La fonctionnalité des NFTs n’est pas dans l’image. Elle est dans la norme qui la rend possible.

Quelle est la différence entre ERC-721 et ERC-1155 ?

ERC-721 est un standard pour un seul NFT par transaction. Chaque jeton est unique et doit être transféré individuellement. ERC-1155 permet de gérer plusieurs types de jetons - fongibles ou non fongibles - dans un seul contrat. Vous pouvez envoyer 10 NFTs et 50 jetons fongibles en une seule transaction, ce qui réduit les frais de gaz jusqu’à 90 %.

Pourquoi ERC-721A est-il populaire ?

ERC-721A permet de créer plusieurs NFTs en une seule transaction, ce qui réduit considérablement les frais de minting. Il reste compatible avec ERC-721, donc il fonctionne sur tous les marchés existants comme OpenSea. C’est la meilleure option pour les artistes qui veulent émettre une collection de 100 à 10 000 NFTs sans payer des milliers de dollars en frais de gaz.

Les NFTs sur Tezos sont-ils plus sûrs qu’Ethereum ?

Pas nécessairement plus sûrs, mais plus efficaces pour les royalties. Le standard FA2 sur Tezos intègre automatiquement les paiements aux créateurs à chaque revente. Ethereum ne le fait pas nativement - il faut le coder manuellement, ce qui peut être contourné. Tezos est aussi plus économe en énergie, ce qui plaît aux artistes soucieux de l’impact environnemental.

Que se passe-t-il si un NFT est perdu sur une blockchain ?

Si un NFT est envoyé à une adresse qui ne peut pas le recevoir - comme un portefeuille non compatible ou un contrat mal écrit - il est perdu pour toujours. La blockchain ne permet pas de récupérer les fonds. C’est pourquoi il est crucial de vérifier que le récepteur supporte le bon standard. ERC-721 est particulièrement vulnérable à ce problème.

Les NFTs sur Bitcoin sont-ils réels ?

Oui, mais avec des limites. Les NFTs sur Stacks (SIP-009) sont ancrés sur la blockchain Bitcoin, ce qui les rend extrêmement résistants à la censure. Cependant, Bitcoin n’est pas conçu pour les contrats intelligents complexes. Les NFTs sur Bitcoin ne peuvent pas inclure de fonctionnalités avancées comme les royalties ou les mises aux enchères. Ils sont plus proches de certificats numériques que d’actifs interactifs.